L’immunité planétaire

Le bateau avance. A son bord des passagers qui regardent en arrière pour voir la terre qu’ils ont quittée et qui a disparu derrière la ligne d’horizon. Et pourtant leurs yeux la voient toujours, leur mémoire pleine de souvenirs projette sans cesse les images imprimées dans ses cellules. La moindre émotion propulse des scènes vécues, rêvées et imaginées. Devant, on ne voit encore rien, mais on le sait, le bateau avance vers un nouveau monde qu’on a appelé numérique.

Désormais, ce voyage fait partie de l’histoire. Nous avons immigré dans le monde numérique et nos tentatives d’y vivre ont été fortement accélérées et multipliées par de longs mois de passage par la pandémie du Covid. De nouveaux réflexes commencent à s’installer. Et quand on parle d’atteindre l’immunité de la population, d’assurer la sécurité contre le virus, la comparaison venant du monde numérique est édifiante.

Contre les virus informatiques, on a d’abord proposé des antivirus, comme, contre le Covid, on propose la vaccination. Mais très vite la seule protection par un antivirus se montrait insuffisante. Les antivirus, pour être efficaces, doivent faire partie d’un système de sécurité. Comme les vaccins qui sont absolument nécessaires dans l’immédiat, mais qui dévoileront leurs limites ensuite s’ils ne sont pas inclus dans un système de sécurité.

Quant à la sécurité informatique, on parle de la sécurité du système d’exploitation et de ses logiciels, mais aussi de la sécurité des connexions internet et des échanges sur le web. Comme des écosystèmes naturels de la Terre et des humains avec leurs relations sociales qui sollicitent des échanges verbaux et corporels. 

Dans la réaction contre le Covid on n’est plus à l’étape du vaccin, mais de l’immunité, d’une protection qui assurera la sécurité de toute la population. Le système de sécurité informatique agit sur tout l’environnement de celui-ci, alors, pourquoi ne pas penser l’immunité de la même manière ? Pourquoi ne pas agir sur tout l’environnement, sur des écosystèmes naturels, pour remédier à leurs dégradations, mais aussi sur des réseaux sociaux pour accroître la solidarité ?

Dès le début de l'humani
té, on cohabite avec le monde viral et animal en essayant de le connaître de mieux en mieux. Mais pour des raisons diverses, l’humain colonise les écosystèmes les uns après les autres (...) Plus on agresse les écosystèmes, plus on empêche les niches écologiques de contenir la menace. Maintenir la biodiversité, avec des espèces multiples, dilue le risque et éloigne le danger pour l’homme (...) Le vaccin est un bouclier indispensable, en particulier pour les plus fragiles. Mais, pour éradiquer ce virus, il faudra une vaccination planétaire, ce qui nécessite une solidarité réelle (1). 



(1) Les propos de Jean Sibilia, doyen de la faculté de médecine de Strasbourg dans Les clés de l’immunité, article de La Vie, N°3947 du 22 au 28 avril 2021, p. 22-25.

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