La civilisation de l’image[1]


  

C’est en Jésus que le Père se donne à voir (Jn 14,9) : la voix portée par les prophètes devient visible, alors, la réalité virtuelle devient la réalité physique. C’est ainsi que “l’Incarnation place les chrétiens en plein dans la civilisation de l’image”. Peut-on donc dire que “le christianisme n’est pas une religion du livre, mais de l’image” ?

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication semblent en tout cas correspondre à la nature de la Révélation chrétienne. Et plus précisément quand on voit cette Révélation comme un service, une diaconie dirait un théologien. Alors, la personne de Jésus apparaît agenouillée devant ses disciples dans le geste du lavement des pieds.

La Révélation chrétienne a souvent été enseignée, transmise par ceux qui savent à ceux qui ne savent pas. La communiquer à ceux qui la pratiquent parfois même plus que ceux qui savent, est un défi. Quitter la chaire de maître, pour se mêler à ceux qu’on est censé enseigner, est un service, un geste de même nature que le lavement des pieds. L’enseignement, la transmission sans gestes de service reste lettre morte ou simplement lettre virtuelle. Les gestes rendent visible ce qui est révélé par la Parole, ils transforment, métamorphosent, accomplissent la réalité virtuelle.

Quels gestes de service correspondraient alors aux nouvelles technologies pour exprimer la Révélation chrétienne ?

Prenons pour exemples les gestes qui libèrent.

- Regarder un écran - cela peut se comparer à l’apprentissage de la lecture. Probablement, ceci n’échappe à personne que les habitués des écrans ne voient pas le monde physique comme ceux qui le regardent avec leurs yeux. Le contraire est vrai aussi, ceux qui n’ont pas l’habitude de rester longtemps devant un ordinateur, une tablette électronique, un téléphone intelligent n’arrivent pas à voir ce qui se trouve sur les écrans, ce qui se cache derrière les icônes et les fenêtres superposées. Même si certaines plates-formes sont plus intuitives que d’autres. Voir ce qui se trouve sur l’écran,” lire l 'écran” au lieu de subir le “tracking” - géolocalisation peut aider à s’en libérer, grâce à la configuration des applications devenue visible. Sinon, on reste entièrement dépendant des spécialistes afin d’éviter des publicités intempestives.

- Apprendre à chercher - en le demandant aux jeunes, par exemple. Au lieu de taper au hasard dans la fenêtre d’un moteur de recherche on peut gagner du temps en apprenant à utiliser les opérateurs booléens ( +,-,“ ”,*, ...), une recherche avancée, une recherche dans une fenêtre de navigation privée. Mais quand on pense qu’apprendre à chercher peut libérer du “profiling” - profilage, l’avantage est encore plus important. Car le profilage repère les goûts et les habitudes en ciblant le chercheur grâce aux résultats de ses recherches extérieures; les prochaines recherches passeront (?) donc dans une sorte d’entonnoir.

Les richesses et les abîmes du Web deviennent visibles grâce aux gestes de service qui facilitent ainsi les choix de celles et de ceux qui parcourent ce monde des réalités virtuelles.



[1] Le titre et les citations sont tirés du livre de Jean-Claude Boillat et de François-Xavier Amherdt, Web&Co et pastorale, Editions Saint-Augustin, Saint-Maurice, 2013, p. 47, 96-106.

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